Notes de lecture

par P. VITAL-DURAND (1982)

Cette rubrique est une retranscription de l’ouvrage « Chronique Brindasienne », édité en 1982 par l’association du Vieux Brindas. Certaines des recherches proposées ici ont pu faire l’objet d’une mise-à-jour par des travaux plus récents. N’hésitez pas à compléter votre lecture par d’autres articles sur le site du Vieux Brindas.

Je suis déjà responsable d’un certain nombre de « chroniques » diverses sur notre cher village. On m’a demandé si aimablement d’en parler encore une fois que je ne pouvais refuser de pondre quelques lignes de plus.

Il faut bien dire que la lecture des ouvrages, plus ou moins anciens, traitant de Brindas est assez instructive, même si l’auteur est mal renseigné. Et cette lecture est d’autant plus intéressante que les indications sont divergentes et discutables, ce qui est souvent le cas.

Nos savants Amis et Confrères de l’Araire et des Commissions des Monuments Historiques n’ont pas négligé le copieux ouvrage que le Sieur T. OGIER publia entre 1845 et 1850 ; nonobstant ses multiples erreurs… je me permettrai de n’en relever que quelques passages. Pourquoi ne pas rappeler comment, dès l’abord, il opine ?

« Sur une éminence dominant une petite plaine assez fertile, entourée au levant et au couchant d’un vallon couvert de bois, dont l’aspect est agréable et riant, se trouve le bourg de Brindas, bâti comme tous ceux du canton, d’une manière fort irrégulière; il n’offre rien qui puisse fixer particulièrement l’attention du voyageur ; quelques maisons bourgeoises se font cependant remarquer par une construction simple et régulière et un confortable que l’on trouve rarement au village. Ce sont les villas de quelques familles opulentes de Lyon, qui viennent y passer les beaux jours de l’été.

« On prétend qu’il a été découvert sur le territoire de Brindas des mines de charbon de pierre … il faut espérer que si la mine est riche, un spéculateur hardi s’empressera de la faire e:r:ploiter, et augmentera, par cette nouvelle branche d’industrie, les ressources bien restreintes de la commune.

Le vin de Brindas est d’une qualité tellement médiocre, que l’on désigne par le nom de cette localité le vin le plus inférieur que produise la France : mais cette réputation nous paraît portée trop loin : car nous nous sommes assurés que le produit de certains coteaux est excellent. »

T. OGIER (1845-1850)

Reconnaissons, chers Concitoyens, que les nombreux couplets sur le vin de notre village sont un des beaux fleurons de notre couronne.

Le Baron RAVERAT est également bien connu de nos Amis. Mais son petit ouvrage sur le Chemin de fer de Fourvières à l’Ouest Lyonnais l’est bien moins, et devenu aussi rare que tels autres de VINGTRINIER. Je ne transcris que quelques passages caractéristiques : nous sommes donc en 1886.

« de là (ayant quitté la gare) en plein soleil, après être sorti des ténébreux tunnels de la Ficelle et des tranchées qui les suivent, nous jouissons d’une vue sur les contrées les plus pittoresques du Lyonnais … la vue embrasse dans son ensemble le vaste faubourg de Vaise avec ses multiples établissements industriels flanqués de colossales cheminées et va s’épanouir sur les riches et plantureux coteaux du Mont-d’Or … Merveilleux tableau encadré par les gracieux circuits de la Saône, lente et paresseuse, qui semble abandonner comme à regret ces rives fleuries et hésiter à entrer dans la ville de Lyon. »

Comme il faut bien se distraire un peu, nous noterons sans aucune malice que notre Baron traversant Craponne dit que :

« le village … est totalement dépourvu de charme et d’intérêt pour l’artiste et le touriste, mais par la propreté de ses maisons, le bon entretien des jardins qui les accompagnent, la bonne culture des champs et la parfaite tenue de son église, on peut juger de l’aisance relative de ses habitants. »

Le Baron RAVERAT ne s’est pas spécialement intéressé à Brindas. Mais les journalistes qui accompagnaient le cortège officiel inaugurant la voie ferrée n’ont pas manqué de souligner que le vin de Brindas est d’autant plus délicieux que la chaleur est plus forte… Et ces mêmes mauvaises langues se sont demandé pourquoi le Maire de Brindas, pour recevoir les autorités, avait posé son écharpe… en bandoulière.

Certaines des lignes qui précèdent ont été déjà publiées. Celles qui suivent viennent du « Guide de l’Ouest Lyonnais » édité en 1897 par la Cie des Chemins de fer (oui, au pluriel) dont nous avons déjà parlé. De charmantes vues (clichés Victoire) agrémentent le texte de Mr GILBERT. Brindas ne saurait être oublié. Que l’on en juge…

« Le nom est bien connu des Lyonnais qui tournent en dérision le vin de Brindas depuis que les bons crus du Beaujolais les ont rendus si difficiles : il n’en est pas moins vrai que ce vin était fort apprécié des chanoines de Lyon au temps où ce territoire appartenait au chapitre de Saint Jean … « 

L’auteur signale ensuite les deux tilleuls centenaires, dits « Sully » qui ombragent l’entrée de l’église. Le fait étant exact il serait possible que plusieurs de nos doyens aient connu les deux tilleuls, l’enquête s’impose. Jusqu’ici tout va bien, mais hélas…

« la route monte et s’approche de la Pillardière. La rivière (l’Yzeron), elle, descend, rapide, à travers des rochers qu’elle doit parfois franchir en cascade; à gauche, elle coule aussi ressérée, mais déjà disciplinée, domptée, contrainte de prêter sa force aux roues d’un moulin et son eau claire aux buanderies éparses sur ses bords. L’endroit s’appelle le Moulin-Vieux et l’on aperçoit le sentier, qui, sous les ombrages les plus verdoyants, au bord de l’eau chantante, y conduit les pas du promeneur ou de l’artiste … La voie ferrée dépasse le petit hameau de la Brochatière et arrive à la halte de la Pillardière, sur la route du Pont Chabrol. La Pillardière n’est qu’un hameau banal, formé de vieilles maisons, une d’elles, appelée la Grand’ Cour élève au-dessus de ses toits plats une tour carrée, massive, qu’une réparation récente a privée de tout caractère. »

Ce n’est pas très flatteur … mais en raison de ces désavantages, les Pillardiérois pourraient peut-être demander un abattement sur le foncier …

Mon dernier sujet a déjà fait couler beaucoup d’encre : c’est l’origine du nom de Brindas – qui; effectivement paraît bien dériver de la racine « BRI ». BRI signifie « élévation » et nous vaut un cousinage avec Briançon. Mais je désirais en savoir un peu plus long – j’ai consulté de savants ouvrages : il appert que Briançon provient bien de « BRIGA » égale « forteresse ». Les uns opinent pour du gaulois, d’autres pour du ligure : nous n’en ferons pas un drame. Et que dans « BRIGA » il y ait « BRI » nous sommes bien d’accord. Et qu’une forteresse soit bâtie sur une élévation, bien sûr. Alors marchons pour « BRI « .

Mais voilà-t-il pas (si l’on veut bien me passer l’expression) que l’inventaire d’un fond d’archives me fait trouver une jolie pièce de 1666 : par devant le Notaire Royal de Mme Princesse Souverains de Dombes (il s’agit de la Grande Mademoiselle, cousine germaine de Louis XIV et qui devait épouser le fameux Dux de Lauzun) … et l’on voit dans cet acte figurer le lieu-dit de BRIANDAS, commune de Tavernost, dans l’Ain. Je me suis dûment renseigné, le lieu-dit existe encore, ainsi que Tavernost, mais d’élévation, point, c’est plat comme la Dombes …

Alors, tant pis, gardons l’élévation « pour mémoire », quoi que l’on puisse dire, on n’empêchera pas Brindas d’être construit sur une colline… et les vieilles et banales maisons de la Pillardière de reposer, à la fois sur le rocher et sur les nappes phréatiques.